Just a word : chapitre 27-Partie03/04 [LUTRAAH]

Publié le par Lutraah/Lybertys

TROISIEME PARTIE

Rapidement, il reprit la route vers chez lui, mais fut de plus en plus troublé en se rappelant de ce que lui avait dit Alex. Le fait que Cyril ait pleuré, ce n’était qu’à cause de Manu. Qu’il soit rentré également et donc, il en vint à conclure que son accident était de sa faute… Mais il ne put s’empêcher de lui en vouloir également, qu’il ne lui ait pas parlé. Seulement, Manu se remit vite à sa place. Même s’il pensait qu’il voulait entendre Cyril lui parler, il savait pertinemment qu’il ne le faisait parce que Manu ne disait rien. S’il était le seul à parler de ses problèmes, cette relation n’allait nulle part. Les quelques minutes qui restèrent de marche le fit se calmer, il se raisonna et ne put que s’en vouloir à lui seul l’accident de Cyril. Manu entra et vit un mot posé sur la table basse, venant de l’infirmière :

« Cyril a un peu de fièvre et a du énormément se fatiguer durant la journée en forçant sur son dos. Il transpire beaucoup. Tu devrais lui faire un massage aux bras, aux jambes et si tu pouvais, sur son visage pour réveiller un peu ses muscles. Prépare-lui également de la soupe pour bien faire… J’ai précisa sur un papier dans sa chambre pour ses médicaments. Merci, à bientôt. »

Manu s’inquiéta directement. Cyril n’allait apparemment pas bien du tout. Il courut et entra en ouvrant la porte vivement :

-          Cyril, est-ce que ça va ? demanda-t-il en s’approchant rapidement du lit.

-          Ca va.. répondit l’homme, apparemment fatigué.

Je m’ennuie, c’est tout.

-          Je suis désolé. Je n’ai pas pu me libérer plus tôt, le patro… le prof m’a fait repasser un contrôle !

-          Et pour le boulot ?

-          Tout va bien, ne t’inquiète pas ! Il a été compréhensif et il t’attendra. Mentit Manu en souriant.
Mais là, je vais m’occuper de toi.

Manu retira sa veste et s’approcha de son visage pour déposer un léger baiser sur sa joue. Il se dirigea ensuite directement vers la télévision. Même si Cyril n’était pas sur le dos, il pouvait ne fut-ce que regarder la télé ou sentir une vie ailleurs. Il la porta donc et la posa sur une table sans un mot, tournant le dos à Cyril un moment pour se battre avec les fils :

-          Mmh, jolie vue ! déclara-t-il.

Manu sourit. Il aimait de savoir que son corps plaisait à son amant et encore une fois, il ressentit subitement son manque du corps de Cyril, de l’embrasser, de le caresser, le lécher mais surtout, une « profonde » envie de le sentir en lui.
Il avait envie que cette « jolie vue » soit toute contre lui, de l’entendre gémir et crier son nom…
Manu resta un instant à s’imaginer cela sans bouger, l’air un peu bête et un sourire béat au visage jusqu’à ce qu’il se ressaisisse subitement et brancha donc les fils, légèrement rougissant à l’idée que Cyril était certainement en train de regarder la scène de son point de vue. Il se retourna ensuite et se sentit bêtement fier en voyant que cela fonctionnait.

-          Merci. Répliqua Cyril en souriant tendrement.

-          C’était avec plaisir mon chéri. Répondit Manu sur un ton de plaisanterie.

Il lui passa ensuite la télécommande en la mettant dans sa main et alla, comme l’infirmière le voulait, lui préparer un bol de soupe.
Une fois revenu, Manu sourit à nouveau en voyant qu’apparemment, cela lui faisait beaucoup de bien de regarder les informations à la télévision. Il se mit à genoux sur le bord du lit et la donna à Cyril avec un plaisir étonnement sincère. Il avait un léger sourire qu’il ne pouvait s’empêcher de faire quand il lui donnait chaque cuillerée avec une attention toute particulière.
Cyril, lui, sembla gêné au départ mais finalement, se détendit et commença la conversation :

-          Ca été les cours ? Tu as du faire quoi comme contrôle ?

-          Ho, je..euh… j’ai du repasser un devoir de math et sinon, les cours… Ca se passe bien.

-          Tu t’es fais des amis ?

-          O..Oui, pas mal !

A ce moment précis, Manu qui arrivait plus ou moins à ne pas renverser une goutte, commença à être tremblant en amenant la cuillère jusqu’à sa bouche. Pour le faire oublier, il préféra changer de sujet directement :

-          Je vais te masser un peu pour te détendre ce soir, ça te dit ? Tu n’auras qu’à regarder un film, je m’occupe de tout… Mais d’abord…

Il remit la cuillère et le bol sur la table de nuit de Cyril et s’approcha doucement de ses lèvres sur lesquelles il déposa les siennes délicatement… Il fit achever ensuite la soupe à Cyril et alla prendre une crème que Manu voyant parfois Cyril appliquer. Même s’il ne le montrait pas beaucoup, c’était quelqu’un qui aimait prendre soin de son corps et il comprit parfaitement que le fait de ne plus pouvoir faire quoi que ce soit devait être pénible.
C’est avec beaucoup de méticulosité que Manu se mit à masser Cyril. Il s’assit sur le lit à ses côtés en faisant bien-entendu attention de ne pas lui faire mal et prit sa main pour commencer par elle. Après avoir pris un peu de crème, il commença lentement à refaire un peu circuler son sang, prenant la peine de le faire un long moment à chaque doigts, pour passer sur la paume de sa main et remonter jusqu’à son bras. Cyril, lui, ne regarda pas la télévision et avait tourné la tête vers Manu pour le regarder un moment. Mais rapidement, il ferma les yeux et profita :

-          Ca va ? Dis-moi si je suis nul, hein. Demanda Manu.

-          C’est parfait ! Vraiment parfait…

Le silence reprit de plus belle. Manu put se permettre de reprendre ses réflexions et réfléchit un moment à ce que lui avait dit Alex. Voir Cyril pleurer… Cela était tellement pénible de le savoir que maintenant, il ne pouvait que le demander :

-          Cyril… demanda Manu, appréhendant la réponse.

-          Mmh ? répondit-il, apparemment détendu.

Après une profonde inspiration, Manu se lança :

-          J’ai parlé à Alex tout à l’heure et… C’est vrai que.. tu as pleuré dans ses bras l’autre jour ?

Il vit Cyril ouvrir aussitôt les yeux, comme pris sur le fait. Il regarda Manu un moment qui ne le lâchait pas des yeux, prêt à avoir une réponse. Il fuit légèrement son regard pour répondre :

-          Oui.

-          C’était à cause de moi, hein ?

-          Manu, comprends-moi… Tu m’avais rejeté presque comme si j’étais un étranger pour toi ou pire, comme si tu avais honte d’être avec moi. Ca m’a fait horriblement mal et Alex était là… Je ne lui ai même pas parlé, j’ai pleuré comme un con dans ses bras sans lui expliquer quoi que ce soit. Mais… je regrette d’avoir craqué si facilement, je parais parfois tellement faible, c’en est pathétique !

-          Racontes pas n’importe quoi s’il-te plaît. Je t’ai demandé ça, ce n’est pas pour te rabaisser à la moindre occasion.

Après quelques secondes, Manu reprit voyant que Cyril ne savait pas quoi répondre.

-          J’aimerai bien te demander une faveur…

-          De quel genre ?

-          Du genre que… dès que tu as envie de pleurer Cyril, que tu te sens mal, que tu as envie de parler ou de ne rien dire, que je te serre dans mes bras ou n’importe quoi d’autre… S’il-te plaît, n’essaie pas de me le cacher et viens près de moi. Tu n’as même pas besoin de me le demander. Je comprends que tu aies eu besoin de pleurer auprès d’Alex parce que finalement, c’était de ma faute mais… le fait que tu me le caches totalement… je dois avouer que j’étais un peu en colère ! Mais je m’excuse… parce qu’au départ, c’est moi le responsable. Tu dois juste essayer de comprendre que je ne suis pas quelqu’un de très démonstratif, et je ne le serai jamais. N’essaie pas d’avoir quelque chose de moi dont je suis incapable et que je ne suis pas…

-          Je n’essaie pas ça, j’essaie juste que tu changes petit à petit, je..

-          Mais justement ! Essayer de changer la personne qu’on aime, c’est une preuve d’amour tu crois ?

-          Et tu crois que je t’étouffe sous mon amour trop…démonstrateur?

-          Quoi ? demanda Manu dans la plus grande incompréhension.

-          Je veux dire.. c’est vrai quoi, je suis toujours là à te dire que je t’aime et que je n’arrive même pas à cacher un minimum. Je suis un poids mort pour toi, toujours à être dépendant de toi, à ne jamais cesser de me dire que je ne pourrais pas vivre sans toi… Je suis faible à tes côtés, je..

-          Quoi ? répété Manu, tout à coup choqué par ses derniers mots.

Apprendre que l’on était faible à côté de son amour, était-ce seulement concevable ? Il lâcha directement la main de Cyril qu’il avait jusque là continué à masser, Cyril sembla vouloir se rattraper aussi vite, mais avant même qu’il ait prononcé une parole, Manu reprit :

-          Tu te considères faible quand je suis là ? Tu sais, je ne t’ai pas demandé d’être dépendant de moi, ne me mets pas en faute pour quelque chose que je n’ai pas fait!

-          Ce n’est pas du tout ce que j’ai voulus dire, tu le sais très bien. C’est juste que j’ai peur de ne pas pouvoir surmonter si on venait un jour à être séparés et ça, c’est quelque chose que je n’ose même pas m’imagine. C’est de cette faiblesse dont je parle…

-          Pourquoi, tu envisages qu’on se quitte un jour ? demanda-t-il, la voix aussi énervée que paniquée.

Mais il sentit rapidement la main de Cyril prendre celle de Manu et la porta jusqu’à ses lèvres où il y déposa un baiser pour répondre ensuite :

-          Je parle de… si un jour, il arrivait quelque chose à un de nous Emmanuel. Si on venait à être séparés par une chose que personne ne peut empêcher d’arriver…

Manu comprit parfaitement qu’il parlait de la mort, qu’il ne surmonterait pas la perte de Manu et cela lui serra aussi fort le cœur que le réconforta. Il se calma directement et se coucha pour être à la même hauteur que Cyril, les yeux dans les yeux. C’était tellement rare des moments pareils, que la conversation ne le dérange pas, il se sentait apaisé de parler de ce genre de choses, d’entendre Cyril ouvrir son cœur. Il serra légèrement plus fort la main de Cyril et approcha son visage du sien sans pour autant faire quoi que ce soit, juste assez pour sentir son souffle… Cyril rajouta, la voix bien plus basse et triste :

-          Si tu venais un jour à vouloir en finir une fois de plus, je ne crois pas arriver à remonter la pente… Je m’en veux déjà que tu ne sois pas plus heureux que quand tu étais à l’orphelinat, alors je..

-          Quand j’étais à l’orphelinat, je n’avais pas une once de bonheur tu sais… avoua Manu.
J’avais beau ne pas montrer que j’allais mal, que je me moquais de tout et de tout le monde, quand tu es arrivé, je…

Manu s’arrêta subitement. Là, il voulait aller trop loin… Il ne voulait plus du tout continuer mais voulut conclure tout de même :

-          Bref, vivre ici sera toujours un réel bonheur comparé à cet enfer qu’a été mon enfance, et ça, dans n’importe quelle situation… Ne t’inquiète pas… Si je parais malheureux un jour, ce ne sera certainement pas de ta faute…

Cyril sourit tandis que Manu resta un moment ainsi, trop à l’aise pour recommencer directement le massage. Il regarda un moment Cyril dans les yeux, ce qu’il fit rarement et puis se redressa sur les coudes pour ajouter d’une voix changé, lourde et marrante :

-          Que vous avez de beaux yeux mon cher !

Manu, se trouvant ridicule,(vas t’cacheeer !) éclata de rire avec Cyril mais qui eut malheureusement mal au moindre mouvement. Pourtant, malgré la douleur, il ne s’empêcha pas de sourire jusqu’à ce qu’il regarde Manu d’une façon étrange, très sérieusement. Manu arrêta aussi vite de rire et le regarda en souriant jusqu’à ce que Cyril reprenne une dernière fois la parole en murmurant :

-          Embrasse-moi... Mais.. un vrai ! Tant pis si ça fait mal, je veux sentir ta langue…

Manu ne se fit pas prier et approcha rapidement son visage du sien en déposa d’abord ses lèvres pour ensuite, ne plus pouvoir se retenir. Malgré la difficulté, la langue de Manu arriva très vite auprès de celle de Cyril, commençant déjà à la caresser dans un manque horrible. Il ne sut trop comment mais l’excitation monta sans même qu’il s’en rende compte. Sans le vouloir, il banda déjà légèrement, sachant très bien qu’ils étaient tous les deux en manque de sexe.
Mais alors qu’il ne s’y attendait pas du tout, il sentit la main de Cyril se poser sur jean, entre ses cuisses et celle-ci remonta lentement pour caresser l’entrejambes de Manu. Il devait se faire horriblement mal pour faire cela et rien que pour ça, Manu arrêta immédiatement tout :

-          Cyril, tu vas te faire mal ! On va attendre !!

-          Pitié Manu… dit Cyril d’une voix extrêmement chaude, murmurant des mots brûlants de désir.
Fais-toi au moins du bien près de moi. Soulage-toi ici pour que je puisse au moins te regarder et participer un minimum.

Manu ne réfléchit que quelques secondes et finit par céder. Il devait avouer que l’idée même de pouvoir se masturber devant Cyril l’excitait encore plus. Il se redressa très légèrement et ouvrit sa ceinture et son pantalon d’une façon extrêmement pressée pour baisser légèrement son pantalon et son boxer. Il n’avait plus du tout le contrôle de son corps, à cet instant précis, il devait impérativement se soulager.
A peine avait-il baissé ses vêtements que déjà, il se mit à se masturber rapidement, regardant Cyril et l’embrassant dès que l’envie le prenait. Il sentit en effet sa main le caresser lentement, ce qui ne faisait qu’accentuer son excitation à cet instant. Le sentir lui caresser les testicules et passer jusqu’à son orifice et l’intérieur de ses cuisses était un véritable soulagement. Même s’il aurait voulu plus, il se sentait au comble du désir en ayant simplement la présence de son amant. Bien trop vite, Manu eut envie de jouir. Peut-être était-ce son manque d’expérience avec en plus, le manque mais il s’arrêta brusquement en disant à Cyril :

-          Je vais aller terminer aux toilettes, je peux pas me permettre de jouir sur les draps !

-          Pourquoi ? demanda Cyril, apparemment déçu.
Tu peux, ça me dérange pas !!

-          Mais tu es couché ici tout le temps, je ne saurai pas changer les draps tout de suite et puis, l’infirmière vient tous les jours et si elle voit ça, elle va nous regarder d’une autre façon, crois-moi.

Manu sourit et déposa un léger baiser sur les lèvres de Cyril pour repartir rapidement dans la salle de bain. En réalité, il était encore plus frustré que lui mais les arguments étaient tels qu’il n’avait pas le choix. Il s’enferma donc et termina ce qu’il avait commencé, ne se retenant pas de gémir en imaginant Cyril et tentant de se remémorer le bienfait de ses caresses, mêmes minimes.
Il revint ensuite dans la chambre de Cyril, les joues légèrement rouges par l’excitation et par la gêne de revenir ainsi. Il ne dit plus un mot, Cyril lui, semblait encore sous l’effet et ne pouvant pas s’empêcher de recommencer à l’exciter, Manu s’assit près de lui et s’approcha de son oreille pour lui murmurer :

-          Dommage que tu es sur le ventre, sinon, je me serai occupé de la tienne aussi…

Cyril le regarda immédiatement, apparemment horriblement excité. Manu fut presque énervé de voir Cyril se résigner à rester couché, il en voulait beaucoup à ces hommes de lui  avoir fait un coup pareil. Si Cyril n’avait rien eut, peut-être auraient-ils pu faire l’amour toute la soirée et reparler un peu avant de s’endormir. Finalement, Manu reprit le massage de Cyril et passa sur ses bras et ses jambes pour lui faire du bien. Manu l’embrassa ensuite une dernière fois et finit par aller se faire à manger, n’obligeant à Cyril que de manger un peu… Il maigrissait beaucoup et il devait avouer que voir que Cyril n’avait plus faim après seulement quelques bouchées, cela beaucoup.
Finalement, à seulement 21h00, Manu se coucha pour s’endormir en peu de temps, éreinté par la journée qu’il avait eu au restaurant. Peut-être que le fait de travailler à sa place allait l’aider à comprendre Cyril sur certains points de vue… Il entendit la télévision fonctionner un peu, sentant bien que Cyril était encore agité par l’excitation et par les massages par la suite, mais de toute façon, Manu ne pouvait rien y faire.
Son réveil sonna à déjà 4h00 du matin le lendemain, et il dut malheureusement se résigner à se lever pour aller travailler. Il haïssait les restaurants, les boulangeries et touts ces endroits où les gens étaient virés de leur lit à une heure presque inhumaine.
Il dut donc se lever en silence pour ne pas éveiller Cyril et alla d’abord lui préparer à manger. Il lui fit du pain et pressa même une orange pour lui, voulant qu’il reprenne des forces.
Il mit ensuite le plateau de telle sorte à ce qu’il parvienne à les attraper sans devoir se faire trop mal ou faire un quelconque effort. Il avait simplement posé un mot sur lequel il avait écrit « je reviendrai quelques minutes à midi pour pouvoir t’aider à manger. A  tout à l’heure. Manu », encore trop fatigué pour chercher quelque chose d’original. Il partit de chez eux sans manger, ayant pris tout son temps pour faire à manger à Cyril et dut courir jusqu’au restaurant pour ne pas être en retard.
Il n’arrêta pas une seconde jusque 8h00 et partit aussitôt en cours, commençant à 8h15. Voilà un début de journée qui l’avait déjà épuisé. Faire toutes les corvées était horriblement fatiguant et il ne put s’empêcher de s’endormir pour la première heure de cours. Il ne s’enleva pas de la matinée ses pensées vers Cyril. Il se trouvait ridicule de réagir presque comme une petite adolescente toute affolée par son mec… Mais Manu devait avouer qu’il se sentait comme ça. Emballé, le cœur qui bat, excité, apaisé, angoissé… Toutes ces choses mélangées faisaient de Cyril la personne la plus importante du monde. Pour lui, c’était l’homme le plus courageux, le plus sensible, le plus honorable, le plus beaux et intelligent qu’il connaissait… Malgré qu’il avait beaucoup de problèmes personnels, des blocages à se débarrasser Cyril était la personne la plus admirable dans son cœur.
L’aimait-il en se disant tout cela ?
De plus en plus chaque jour, il était tenté de dire « oui ».
En pleine euphorie, il n’entendit pas directement la cloche retentir midi et il ne s’en rendit compte que quand les cinq garçons étaient autour de son banc.
En les regardant, il pensa subitement qu’il ne connaissait que le prénom de « Sébastien ». Les autres lui étaient totalement inconnus, alors, pourquoi le frappait-il ? Était-ce réellement et rien que parce que Manu assumait pleinement sa sexualité ? Et qu’il n’avait aucune honte de dire qu’il était gay ? En attendant, par leur violence, Manu en venait à se remettre en question ? Peut-être que finalement, l’homosexualité était réellement quelque chose de contre-nature. Peut-être que ce qu’il faisait avec Cyril, tous ces sentiments entre eux était une maladie qu’ils devaient absolument soigner ? Mais alors, pourquoi l’idée même de ne plus aimer Cyril un jour et réciproquement lui déchirait-il ainsi le cœur ? S’ils étaient soignés, deviendraient-ils des étrangers l’un pour l’autre ? Ou seraient-ils séparés pour ne pas être tentés et rechuter dans cette abomination…
Pourquoi aurait-ce été une maladie après tout. Cyril et Manu s’aimaient, tant qu’ils n’étaient pas séparés, rien ne pouvait atteindre leur couple.
Seb s’en prit directement à Manu, apparemment encore plus de mauvaise humeur. Sans un mot, d’un coup de main, il fit tomber le plumier de Manu qui réagit étonnement calmement. Manu hésita une seconde à se baisser pour le ramasser, mais finit par le faire. S’il voulait partir rapidement jusqu’au travail, il fallait qu’il se dépêche. C’est en soupirant, agacé qu’il ramassa son plumier mais, comme il l’avait sentit, les garçons profitèrent de ce moment pour lui prendre son sac, sa veste et le forcèrent à sortir de la classe. Pour ne pas se faire voir par les professeurs, ils mirent Manu au centre des cinq garçons, ne pouvant pas du tout s’enfuir. Il avait beau lancer un regard effrayé aux professeurs, même si ceux-ci savaient comment étaient les cinq garçons, ils ne firent absolument rien et Manu se retrouva rapidement à l’extérieur, tremblant déjà légèrement de froid puisque quelqu’un avait pris sa veste. Une fois un peu plus éloigné, deux des jeunes reprirent Manu avec beaucoup plus de violence cette fois, vers « leur coin », là où personne ne les voyaient fumer leurs joints. Même s’il voulait de tout son cœur se défendre, s’enfuir, il ne le pouvait pas, cela n’aurait fait qu’empirer les choses. Seulement, quand il vit qu’un d’entre eux était en train de fouiller son sac, Manu réagit immédiatement. Il tenta de se dégager des bras des deux autres tandis :

-          Touches pas à ça !! Foutez-moi la paix, je vous ais rien demandé bande de salauds !

Il regretta aussitôt ses mots en voyant que Seb levait le regard, étant en train de s’allumer une cigarette. Et il le pensa bien car à peine l’avait-il allumée qu’il s’approcha de la veste de Manu qu’il prit sans un mot des mains d’un de la bande. Il la tendit ensuite à celui qui s’était servi dans le sac de Manu :

-          Vas-y, décore-la comme une tapette aimerait le faire !

Il lui murmura ensuite quelque chose et cela ne paraissait rien de bon à voir le sourire que faisait celui qui écoutait. Manu en aurait bien pleuré de misère, il aurait supplié n’importe qui pour que ce calvaire, cette peur, cette haine disparaissent. Seulement, cela ne faisait que commencer… Il vit ensuite Seb s’approcher de lui et le regarder un moment en lui soufflant sa fumée de cigarette sur le visage. Manu n’en pouvait plus, et préféra être clair une bonne fois pour toute :

-          Si tu veux te défouler vas-y, parce que je n’ai pas le temps avec tes gamineries !

Une lueur presque meurtrière apparut dans les yeux de Seb et celui-ci écrasa immédiatement sa cigarette sur le sol avant de remonter le visage vers  manu avec un léger sourire. Les deux autres qui tenaient Manu, en voyant le regard de Seb, resserrèrent leurs mains autour des bras de Manu, sachant tous très bien que cela n’allait pas s’achever là. Directement, Sébastien se dirigea lentement jusqu’aux affaires de Manu, jetées à terre. Il prit un livre de cours et prit dans sa poche un briquet, brûlant ainsi ses cours devant ses yeux :

-          T’es vraiment un connard ! T’as pas de couilles pour vouloir te battre avec tes quatre autres dégonflés ?

Seb n’écouta même pas et reprit un cahier de plus… C’est en ayant fini absolument tout qu’il fit un hochement de tête à celui qui avait toujours sa veste. Le garçon prit directement un feutre indélébile et se mit à genoux avec un sourire jusqu’aux oreilles pour commencer à inscrire des choses que Manu devinait parfaitement. En seulement quelques minutes, il n’avait plus la moitié de son matériel scolaire, il n’avait plus ses livres de cours et n’avait plus de veste. Qu’allait-il dire à Cyril… ? Qu’allait-il inventer comme excuse pour qu’il n’ait pas à avouer ce qu’il endurait ? S’ils venaient à le frapper au visage, serait-il viré du boulot auquel il doit être présent et en forme pour que Cyril le garde ?
Sébastien revint enfin vers Manu, mais cette fois, l’on voyait bien que son intention était de le frapper. Et en effet, il envoya directement un coup de poing dans le ventre de Manu qui, encore une fois, ne put qu’encaisser le coup sans rien dire. Il en ramassa plusieurs tandis que Sébastien était en train de lui parler, la voix tout à fait paisible :

-          Celui qui a pas de couilles, c’est bien toi, la tantouse ! Si tu crevais, peut-être qu’on aurait un peu plus de compassion pour toi…

Il releva ensuite le visage de Manu, qui tenait déjà à peine sur ses jambes par la force que donnait Sébastien, et reçut un coup de poing tellement fort qu’il ne put rester debout. Ses jambes lâchèrent, étant encore tenu par les deux garçons pour une raison qui n’était même plus valable. Il n’aurait même plus été capable de s’enfuir à présent mais la seule chose qui lui vint en tête était le coup au visage. Mais alors qu’il était à genoux, pleurant presque par la douleur et l’humiliation qu’il devait subir, il sentit que Sébastien lui tirait les cheveux et c’est avec un léger sourire qu’il alla jusqu’au bout. Il approcha la tête de Manu à son pantalon et finit par lui coller en rigolant. Entendre ces cinq garçons rire du malheur de Manu ne put que l’enfoncer encore plus. Ses larmes ne prirent plus une seconde de plus à couler et il entendit l’humiliation verbale reprendre de plus belle :

-          Alors, t’as pas envie la sucer ma queue, sale pédale ? Ca doit bien faire les pipes les tantouses dans ton genre non ? dit Seb.

-          Ouais, vas-y  qu’on rigole un coup ! rajouta un autre.

Même si à cet instant, Manu ne fut obligé de rien faire, sentir le sexe d’un autre, même à travers un pantalon, le dégoutait. Il avait encore plus honte de lui et arriva jusqu’à s’en vouloir d’être homo. Entendre et supporter toute cette humiliation lui donnait envie de mourir de honte…
En plus de son corps, son cœur lui faisait horriblement mal. Il n’arrivait pas à comprendre cette violence qu’ils éprouvaient envers lui. S’amuser du malheur des gens était une chose qu’il ne pouvait supporter, même s’il avait fait endurer beaucoup de choses aux autres orphelins, jamais il n’aurait été jusque là.
Manu, n’en pouvant plus, se laissa à faire quelque chose qu’il n’aurait jamais imaginer faire un jour pour avoir la paix ; se rabaisser… C’est d’une voix brisée par ses larmes et par la torture qu’il dit :

-          Je vous en supplie.. laissez-moi ! Je n’ai rien fait de mal, je..

Il n’eut pas le temps de terminer sa phrase que déjà Sébastien lui lança la tête en arrière violemment, Manu se laissa tomber, trop mal physiquement et moralement pour se relever. Les quatre garçons, eux, retournèrent déjà vers les classes tandis que Sébastien s’accroupit près de Manu qui restait à terre :

-          Tout ceux de ton genre devraient crever alors, aide-nous et vas te suicider toi et ta tapette de mec, c’est compris ?

Il se releva et alors que Manu croyait avoir enfin la paix, il reçut un dernier coup de pied dans le bas ventre et vit qu’il lui lança sa veste près de lui, comprenant bien que Sébastien voulait qu’il lise ce que l’on avait écrit dessus.
Il prit de longues minutes avant de pouvoir se redresser, complètement abattu. Il se sentait vaincu… C’est finalement pour regarder l’état de sa veste qu’il se redressa difficilement, les coups lui lançaient dans tout l’abdomen et son visage. Comme il se l’était dit ; « Pd, pédale, tantouse, crèves,… » Tout ce qu’il se ramassait dès qu’il venait à croiser ces garçons. Il ne savait pas du tout comment il allait faire pour avoir une nouvelle veste, de nouveaux cahiers… C’est tel un robot qu’il ramassa le peu d’affaires qui lui restait et qu’il se releva, crachant un peu de sang par la force du coup de poing qu’il avait reçut au visage. Décidant de ne pas aller voir Cyril tout de suite, il prit du temps à aller jusqu’au restaurant, grelotant de froid et souffrant le martyre par les coups reçus. Il ne pleurait même pas, il réagissait comme s’il était totalement sous le choc et alla donc jusque là où il rentra. Il se força à se redresser et à marcher convenablement malgré qu’il serrait les dents de douleur, faisant alors comme si de rien était en entrant. Le patron regarda l’état de son visage un moment mais finit par ne rien dire et passa à côté, laissant Manu à la plonge. Il regarda un peu si personne ne le voyait et finit par rapidement sortir dans la petite cour à l’arrière et alla mettre sa veste aux ordures, ne pouvant même pas la laver. Irrécupérable…
Il rentra ensuite et bouscula Alex.

-          Salut Manu. Dit-il avec un grand sourire.
Comme tu v..

Il sembla remarquer aussitôt le coup de Manu et réagit.

-          Ouah, tu t’es battu ?

-          Qu’est-ce que ça peut te foutre ?

-          Absolument rien, c’est juste pour assouvir ma curiosité.

-          Alors, dégages de ma vue !

-          Ca te fait mal ? demanda-t-il en posant déjà sa main sur la blessure.

Manu tourna légèrement le visage par la douleur que cela lui infligeait déjà. Il lui tira ensuit le bras en regardant discrètement s’il n’y avait pas le patron dans les parages et prit le nécessaire pour le soigner. Manu réagit immédiatement en reculant :

-          Je veux pas de ton aide ! Fous-moi la paix.

-          Aller, Manu, fais pas ton gamin. Il faut te soigner sinon, tu vas te choper un bleu encore plus horrible !

  

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