Not alive without you: chapitre 12 partie 03 [LUTRAAH]

Publié le par Lutraah

 

- Qu'est-ce qui se passe… murmurai-je.

 

A ce moment, Quentin arriva dans mon champ de vision, et à travers la vitre, je lisais clairement à son regard qu'il était parfaitement au courant.

 

- Qu'est-ce que c'est? m'empressai-je de demander quand il arriva à l'intérieur, paniqué.

- Justement… dit-il, très mal à l'aise. Je voulais t'en parler…

- C'est quoi, ça? haussai-je le ton. Qu'est-ce qui se passe, Quentin? 

 

Je me retournai pour vérifier si tout était en place. Rien n'avait bougé. Mais pourtant, ce panneau montrait bien au public que le lieu était à vendre. 

 

- Dis-moi! criai-je, ne voyant pas de réponse.

 

Je me surprenais de l'audace que je prenais. Mais la rage en moi me semblait trop forte à supporter.

 

- Viens. On va rentrer et je t'expliquerai. dit-il calmement.

 

Il voulut me prendre le bras gentiment pour m'accompagner à l'entrée mais je reculai. 

 

- Je ne partirai pas tant que je n'aurai pas ma réponse. Tu veux vendre "mon" magasin?

- D'accord. Je vais t'expli…

- Tu n'as pas le droit! criai-je, sachant de toute façon ce qu'il allait me dire.

- Thomas. J'ai des soucis en ce moment, d'accord? J'ai des problèmes d'argent. Je ne peux plus te payer cet endroit.

- Des soucis de fric? Tu rigoles? Tu viens de claquer des milliers de dollars rien qu'aujourd'hui. 

 

J'avais subitement une rage que je n'arrivais pas à qualifier. C'était la première fois que je me sentais aussi en colère. J'aurais voulu tout briser, tout jeter à la figure de Quentin. 

 

- On rentre. dit-il tout à coup, mettant close cette discussion.

- Pas question! Je ne partirai pas tant que tu n'auras pas laissé tomber cette idée stupide! criai-je en jetant le panneau sur le sol. 

 

Je ne pus m'empêcher de shooter dedans, l'envoyant valser dans le coin de la pièce, ce qui eut le mérite d'exacerber Quentin. Celui-ci m'empoigna le bras et ne me donna plus le choix. Je tentai en vain de me défaire de son emprise, mais il avait bien trop de force pour moi. Nous arrivâmes rapidement à la voiture alors que tous les regards étaient sur nous. De mon côté, je ne pouvais m'empêcher de lui crier dessus. Je lui hurlai pratiquement de me lâcher, que je ne voulais pas partir tant que le problème n'était pas réglé. 

 

Le trajet en voiture fut la même chose. Je ne pus contenir mes larmes. Je me sentais tellement trahi que face à la froideur et le stoïcisme dont il faisait preuve à ce moment-là, ma haine n'était qu'accentuée. Je lui demandai pourquoi il me faisait ça. Tout cela n'avait pas de sens. 

 

Rapidement, nous arrivâmes à la maison. Je claquai la porte tellement fort que Quentin me hurla de me calmer. Mais je n'en avais pas finis. J'attendais simplement d'être à la maison afin que Quentin ne soit pas trop mal à l'aise à cause de ma crise de nerfs.

 

- Comment as-tu osé? hurlai-je, une fois à la maison, jetant ma veste sur le sol.

- Et toi, comment oses-tu hurler comme ça? Tu veux que je hurle? Tu le veux? 

 

Quentin se dirigea vers moi en furie au point que je crus qu'il allait me frapper. Ses yeux étaient bestiaux mais il se contenta de me pousser pour aller se servir un verre.

 

- C'est ça! Vas-y. rigolai-je ironiquement. Evite le sujet! C'est vrai, je suis tellement heureux ici. Pourquoi aurais-je besoin de cet endroit.

 

Devant son silence, je ne pus m'empêcher de recommencer. Je ne savais pas ce qu'il me prenait, mais Quentin avait réveillé en moi un flot de rage que j'avais gardé en moi. Ce qu'il faisait… C'était une des pires trahisons de toute ma vie.

 

- Quentin! hurlai-je de toutes mes forces. 

 

Sans arriver à me contrôler, je lui lançai un coussin au visage qui lui fit renverser son verre sur sa chemise.

 

- C'est une chemise à 200 dollars! Espèce de con! hurla-t-il. 

- Ecoute-moi quand je te parle! 

 

Quentin s'approcha si près que je pus voir la veine de sa tempe gauche battre à toute vitesse, me jaugeant de toute sa hauteur. Et d'un ton glacial et serrant les dents, il me dit de parler. De mon côté, perdant tout de même de mon assurance - ou plutôt de ma folie - je balbutiai un moment.

 

- C'est bien ce qu'il me semblait. murmura-t-il en s'éloignant.

 

Je laissai mes larmes couler un instant, culpabilisant à nouveau de ne pas pouvoir continuer et dire ce que je désirais. La peur m'envahissait à chaque instant. J'étais fatigué de retentir cette pression constante. Quentin reprit alors, d'un ton bien plus calme sans y ajouter une once de douceur et de compassion:

 

- J'ai estimé que cet endroit me coutait trop cher. 

- C'est pour ça qu'on a fait tout ça aujourd'hui? Tu voulais te faire pardonner?

- Me faire pardonner de quoi? me dit-il, droit dans les yeux, se resservant un verre par après. Je n'ai rien fait de mal, Thomas. Je pense que tu es déjà suffisamment gâté comme ça. 

- Gâté? murmurai-je.

 

Je n'en revenais pas de ce qu'il disait. Je hurlai à nouveau mon dernier mot, comme pour me l'intégrer. Alors, durant toutes ces années, il me considérait comme gâté? Comme un chien à qui on offrait un bel os afin de pouvoir mieux le traiter comme on le désirait? Je me sentais chavirer. Et dire que quelques heures auparavant, je n'avais osé douter de lui plus longtemps. J'avais une fois de plus cru en sa bonne foi. 

 

Pour toute réponse, il but une gorgée sans me jeter un regard. Je ne pus en supporter plus. Je marchai vivement jusqu'au dressing, niant ses appels. En ouvrant la porte du dressing, je vis qu'en effet, tout était rempli à craquer. J'avais un nombre de vêtement, chaussures et accessoires invraisemblables. Je haïssais cette pièce. C'était à cause de toutes ces choses qu'il me considérait comme gâté. J'étais tout sauf gâté. 

 

- Thomas, qu'est-ce que tu fous? cria Quentin.

 

Je ne lui répondis plus, j'étais comme possédé. J'entrepris de jeter sur le sol toutes mes affaires. J'arrachai mes vestes de leurs cintres, que je jetais au loin. Chaque pull, chaque chemise, chaque pantalon… Tout se retrouva sur le sol. Et c'est quand j'ouvris le tiroirs où se trouvaient tous les accessoires de valeurs que je me mis à nouveau à verser des larmes. 

 

- Si tu crois que toutes ces choses m'aident à mieux vivre! criai-je. Tu te mets le doigt dans l'oeil. 

 

Je pris alors une poignée de montres, bracelets que je jetai sur Quentin en me retournant.

 

- Arrête, Thomas! hurla Quentin en se protégeant le visage. Stop! Arrête ce cinéma.

- Je ne joue pas la comédie! protestai-je. Tu m'enlèves la seule chose que j'ai. Toutes ces conneries qui sont là, j'en ai rien à foutre! 

 

Et alors que je me retournai pour lui lancer une deuxième poignée, je le trouvai à quelques centimètres de moi. Il me prit fermement le poignet.

 

- Lâche ça tout de suite. 

 

Son regard dans le mien me dominait complètement, et je ne pus que me soumettre à son ordre. Ma respiration était saccadée, mon corps tremblait de tous ses membres.

 

- Je te déteste! ne pus-je m'empêcher de dire doucement en laissant couler mes larmes. Je te hais… Je te hais depuis des années! Tu m'enlèves la seule chose qui me reste. Comment peux-tu me faire ça?

- Je fais ce que je désire, tu entends? me cracha-t-il. Et si j'ai envie de détruire jusqu'à la dernière miette qui reste d'espoir en toi, je la détruirai. 

- Comment peux-tu me dire ça? soufflai-je après un moment, horrifié par ses paroles. 

- C'est comme ça l'amour, mon coeur. L'un marche, l'autre suit. 

 

J'étais impuissant face sa haine. Pour toute réponse, je me contentai de lui dire dans un sanglot:

 

- Tu me tueras un jour…

 

Il ne prit même pas la peine de répondre. Il se contenta de me lâcher et alors que je croyais avoir simplement abandonné, je sentis ma main se lever et se rabattra violemment sur sa joue. Je ne sus pourquoi j'avais fait ça. Je ne sus la folie qui m'avait pris d'avoir osé faire une telle chose. Je vis le regard de Quentin se voiler. Et alors que je lui demandais déjà de m'excuser, je sus parfaitement à sa manière de se positionner que j'allais regretter amèrement mes actes de ce début de soirée. 

 

- Pardon Quentin. Pardon, pardon, pardon… je ne voulais pas. Je t'assure… C'est parti tout seul, je ne voulais pas te faire ça. 

 

Je sentis sa main passer derrière ma nuque. Mes lèvres tremblaient sans que mon regard ne lâche le sien. Il me figeait de ses yeux, m'empêchant de détourner les miens. Je me sentais soumis tel un chien. 

Toute cette journée n'avait été qu'une machination. Il se servait totalement de moi. Je me sentais trahi comme je ne l'avais jamais été. Chaque fois que je pensais qu'il faisait un effort pour moi, je me retrouvais à être déçu bien plus que je ne pensais pouvoir l'être.

 

C'est dans un acte d'instinct de survie que je voulus me défaire de lui rapidement. Cela sembla marcher car Quentin ne s'y attendit pas mais il me rattrapa bien assez vite dans le couloir où il me fit un croche-pied. Je m'effondrai sur le carrelage froid, où je sentis ma mâchoire frapper contre, me lançant une douleur épouvantable. Mais je n'arrivais pas à y prêter de l'attention, je me contentais de crier sur Quentin pour qu'il me lâche, le suppliant de ne pas me faire de mal. 

 

Un premier coup de pied atteignit mes côtés pendant qu'il défaisait sa ceinture. S'en suivit un nombre de coups que je ne voulus pas calculer. Je tentai simplement de me protéger au mieux, attendant que sa crise passe. Quand il fut à bout de souffle, il se mit sur les genoux et prit ma mâchoire dans ses doigts pour la serrer horriblement fort et s'exclama:

 

- Tu es tout seul, Thomas! Personne n'est là pour t'aider. Ni ton père, ni ta mère… Ni tes débiles de soeurs! Tu es à moi. Tu m'appartiens!

 

Il me relâcha en donnant un dernier coup de ceinture et partit comme si de rien n'était, me laissant seul à ma douleur physique et à ma crise de larmes en repensant à cette famille que j'avais à jamais perdu. Et que je regrettais tellement que j'eus l'impression de mourir. 

 

Tel un automate, je me relevai après un moment et allai simplement ranger les affaires que j'avait jetées. Voilà la seule et unique chose que je pouvais faire… Ranger un maximum pour que ce mode de vie soit le plus caché possible. C'était malheureusement fatal. Je me fis réellement à l'idée pour la première fois que Quentin tuerait un jour. Et étrangement, cela ne me dérangea pas. J'osai même espérer que cela se fasse vite. Je choisis la facilité, car essayer de s'en sortir relevait de l'impossible. 

 

Et alors que je ramassai mes bijoux pour les remettre à leur place, je vis au fond du tiroir quelque chose qui ne m'appartenait pas. Je n'en crus pas mes yeux. Une arme se trouvait dans cette armoire… Dans celle où je rangeais mes objets de valeurs. Je le pris dans ma main, étonné de sa lourdeur mais hypnotisé par la puissance que je recevais d'elle. J'avais cette impression que je pouvais être enfin invincible. Qu'allait-il faire si je la gardais? Se souvenait-il seulement que cette arme se trouvait à ma portée? S'était-il dit qu'un jour peut-être, je serais tellement désespéré que je souhaiterais m'en servir. Je devais la mettre là où je l'avais trouvé, je me surpris à marcher vers le salon, cette arme à la main. Je me sentais comme fou, ne sachant plus contrôler ce que je faisais. Tout avait été tellement loin, mon esprit ne pouvait plus suivre la réalité. Alors, mon corps se chargeait de faire ce qu'il voulait…

 

C'est au son caractéristique du chargement du pistolet que Quentin tourna la tête en sa direction. Je voyais ce qu'il se passait par séquences, ne me rendant absolument pas compte de ce que je faisais en cet instant. Je dirigeai l'arme vers cet époux que je connaissais si peu, la main tremblante. Je n'avais jamais vu Quentin se relever aussi rapidement du divan, paniqué. 

 

"Ca y est", pensai-je. Je l'avais enfin ce pouvoir qu'il avait sur moi. 

 

- Nom de Dieu Thom! Qu'est-ce que tu fous? Lâche ça tout de suite! cria-t-il en levant légèrement les bras pour me montrer que j'étais le seul à avoir le dessus cette fois.

- C'est fini! lâchai-je sans réfléchir. Je ne peux plus… C'est trop pour moi. C'est beaucoup trop.

- Où est-ce que tu as trouvé cette arme? 

 

Il fit mine de vouloir avancer mais je lui hurlai tout à coup de ne pas bouger. Je me fis peur moi-même à cet instant. En moi se trouvait un désir que jamais je n'avais éprouvé… Celui de l'éliminer une bonne fois pour toute. Le jugement, la prison, la réclusion… Tout cela me semblait bien dérisoire face au calvaire que je vivais depuis des années. 

 

- Thomas… Ne fais pas ça. Tu le regretteras. dit Quentin, me sortant alors de mes pensées. 

 

C'est dans un sanglot que je lui répondis, mes paroles à peine perceptibles à cause du déchirement de ma voix.

 

- Quentin… Je t'aime. Mais là… Je n'en peux plus… 

 

Séchant rapidement mes larmes avec mon bras libre, je le vis tenter une approche. Il semblait déjà avoir repris son sang froid et se retrouvait être celui qu'il était tous les jours. C'est les mains en évidence qu'il répondit, un sourire à peine perceptible sur ses lèvres.

 

- Vas-y, Thomas. Fais-le si tu l'oses….

 

Alors que j'avais le doigt posé sur la gâchette, je le regardais, hésitant. Et alors que je pensais que je pouvais enfin lui dire tout ce que j'avais sur le coeur sans qu'il me domine comme il le faisait toujours, je le vis mettre dans ses mains dans ses poches en rigolant ironiquement.

 

- Tu es incapable de le faire. Tu m'aimes beaucoup trop pour tirer… s'exclama-t-il.

 

Cela me fit tellement de peine que je me mis à pleurer deux fois plus. Il avait tellement raison… "Que ferais-je sans lui" pensais-je. Je ne pouvais pas vivre tout seul… Sans lui. Il était ma raison d'être. Et même si elle était très restreinte, le peu qu'il me restait venait uniquement de sa présence. Comment ferais-je dans ce monde sans lui. 

 

- Oui… C'est vrai. Tu as raison… murmurai-je. Mais…

 

Et alors que Quentin commençait à s'approcher d'un pas lent, les mains toujours dans les poches et cette arrogance amplifiée pour l'évènement, j'eus l'impression d'être totalement en dehors de mon corps. Comme désincarné, je vis ma main portant l'arme se tourner et se poser sur ma tempe. Le froid du pistolet me fit frissonner et alors que je crus que j'allais ne plus savoir parler, je déclarai à Quentin dans un souffle

 

- Je t'aime trop. Mais moi, je me hais assez pour le faire.

 

Et alors que j'entendis Quentin hurler de ne pas le faire, tout se fit très vite. Mes yeux se fermèrent, mon doigt appuya sur la gâchette, mes oreilles se bouchèrent rendant les appels de Quentin imperceptibles. Ca y est… J'avais trouvé la libération la vraie.

 

Un clic. Le néant. Mais la douleur toujours aussi vive et présente. Dans un état second, mes yeux s'ouvrirent à nouveau. Ma vue était trouble mais je perçus tout de même mon époux me retirer l'arme et vider aussi vite le chargeur duquel rien ne sortit. Il la lâcha sur le sol et me prit dans ses bras en me serrant tellement fort que je ne sus respirer, se répétant à lui-même que "l'arme n'était pas chargée, l'arme n'était pas chargée…" Mon esprit ne pouvait en supporter davantage et comme pour fuir la réalité, je me laissai aller dans les bras de Quentin qui semblait si soulagé. Je m'évanouis, éreinté, consterné.

 

 

 

Suite à la partie 4:  Not alive without you: chapitre 12 partie 04 [LUTRAAH]

Publié dans Not alive without you

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